Un plan d'une extraordinaire puissance évocatrice contient tout entier en lui l'essence de Vers l'autre rive. On y voit un couple regarder, ensemble, dans le même cadre mais séparés par quelques mètre d'écart, quelque chose d'à la fois angoissant et merveilleux qui se trouverait par-delà les collines verdoyantes qui rythment l'horizon.
On les sent profondément liés par une harmonie intime mais irrémédiablement séparés par une force qui les dépasse. Cette force, c'est celle de la mort qui, 3 ans plus tôt, a emporté Yusuke, le compagnon de Mizuki. Yusuke est revenu sous une forme humaine incarnée pour retrouver celle qu'il aime afin qu'elle l'accompagne et veille sur lui durant ses derniers jours parmi les vivants. Profondément ancré dans la spiritualité japonaise, le voyage auquel nous convie Kiyoshi Kurosawa est celui d'un deuil durant lequel vivants et morts pourraient se dire tout ce qui a été tu afin qu'ils puissent se quitter l'âme légère, dans la sérénité.
Formidablement maîtrisé (chaque plan fait sens sans jamais surligner), Vers l'autre rive utilise, tout en la renouvelant, l'imagerie des fantômes asiatiques et l'emmène, avec une délicate sensibilité, vers une exploration intime des relations humaines.
Vers l'autre rive: corps et âme en paix