"Alceste à Bicyclette": rencontre avec Lambert Wilson - Actu Cinema

 
Dans le cadre de la sortie en salles du film "Alceste à bicyclette", nous avons rencontré Lambert Wilson. Homme de théâtre et de cinéma, il nous parle du tournage du film, de sa rencontre avec Luchini et de son regard sur la célébrité. Comment s'est passée votre rencontre avec Fabrice Luchini ? C'était la première fois que je travaillais avec lui. J'essaye toujours de ne jamais avoir d'a priori sur les gens. Je trouve que c'est un acteur formidable. Au delà de son utilisation de la langue français et de ses excès qui sont devenus sa marque de fabrique, il me fascine par les expressions qu'il parvient à faire avec son visage. J'avais évidemment une appréhension concernant ses débordements, cette démesure qu'on lui connaît. Mais à ma grande surprise, j'ai trouvé ses poussées d'adrénaline très divertissantes. Il est exactement comme ça sur le plateau. Je pense qu'il est véritablement possédé par des impulsions intellectuelles. Le Misanthrope, pièce de Molière est le fil conducteur du film. Saviez-vous que jouer cette pièce au cinéma était un rêve de Fabrice Luchini ? Nous avions tous les deux une connaissance de la langue française du 17e siècle. Lui connaissait Molière et moi Racine. Il n'a pas arrêté de me charrier parce qu'il trouvait que je faisais trop de liaisons en déclamant les alexandrins. Mais je ne me suis pas senti impressionné par lui car je pense avoir des bases assez solides. J'ai déjà beaucoup manié l'alexandrin sur scène. J'étais persuadé qu'il m'attendait au tournant alors j'ai mis les choses au clair d'emblée lors d'une première lecture autour de la table. Je crois que ça l'a rassuré. Il n'aurait pas été à l'aise avec un acteur qui n'aurait jamais joué de texte classique. Mon expérience au théâtre m'a donc été très bénéfique. Dans le film, vous incarnez un personnage quelque peu maladroit dans sa façon de jouer. Régresser est-il un exercice difficile pour un acteur? C'était la partie la plus difficile de mon personnage. Aucun acteur ne veut paraître nul. Mais il faut réussir à faire taire cet orgueil. Il faut oser se ridiculiser. Le personnage n'a effectivement aucune expérience du théâtre mais il a une véritable passion pour ce texte. Malgré ses premiers pas maladroits, je considère que c'est un bon acteur car il s'adapte très vite. Il va progresser grâce à Serge (Fabrice Luchini) qui, en étant insupportable et en le martyrisant va lui permettre de devenir meilleur. Trouvez-vous que Gauthier, votre personnage, vous ressemble ? Je crois qu'il ressemble à ce que j'étais à la fin des années 80. J'avais beaucoup d'ambitions, j'avais envie d'être populaire, je voulais avoir le label cinéma et en même temps le prestige du théâtre. Mon personnage est un véritable opportuniste, ce que je n'ai jamais été. En revanche, son aspect extérieur, son côté très coiffé, très habillé, un peu poudré me fait penser à moi à une certaine époque. Mais mon personnage ressemble surtout à Philippe Le Guay, le réalisateur. Il ne me l'a pas dit aussi clairement mais je me suis rapidement aperçu que je l'incarnais. On reproche à mon personnage son excès de gentillesse. Philippe a certainement dû souffrir de ce genre de reproche. Je sentais que c'était quelque chose qui le touchait. Il prenait d'ailleurs très souvent la défense de mon personnage. J'étais très content parce que souvent je suis plutôt enfoncé par le metteur en scène. Est-ce vrai qu'il a vous a laissé le champ libre pour improviser ? Le scénario était extrêmement bien écrit donc il y a eu très peu d'improvisation. Mais j'adore cet exercice, j'ai été formé à cela. Evidemment, quand on improvise avec Fabrice Luchini, on a intérêt à s'accrocher. Dans la pièce de Molière, les deux personnages centraux sont Alceste qui condamne la société, qui hait les hommes et Philinte qui est plus conciliant mais un peu hypocrite. Pensez-vous être plutôt Alceste ou Philinte ? Je me suis posé cette question et je dirais que je suis plutôt Phileste. Je pense que je suis principalement Philinte avec des pointes régulières chez Alceste. J'ai de l'amour pour l'humanité malgré une forme d'accablement désespéré. J'éprouve de l'amour pour le genre humain mais je suis régulièrement effaré par nos priorités et par ce qu'on est prêt à détruire pour obtenir quelque chose. Dans le film, le personnage de Fabrice Luchini fait la critique du métier d'acteur en disant que, dans ce milieu, il n'y a aucune amitié ni aucune loyauté ? Avez-vous cette impression ? Cette pensée m'a traversé l'esprit mais c'est de l'égocentrisme, de l'inquiétude et de la paranoïa. Ce qui est difficile dans ce métier c'est qu'il est impossible d'entendre une parole de vérité. Dans les moments de doutes et de remises en question, on aimerait que quelqu'un nous dise "Tu es en perte de vitesse" ou "Ton image s'est dégradée, c'est pour cela que tu ne reçois plus de proposition". Mais les gens du milieu vous laisse toujours dans un flou artistique pour vous préserver. Le métier manque d'honnêteté, de loyauté et de vérité. Dans ces moments-là, c'est à la famille que revient le rôle de dire la vérité ? Ma famille était plutôt là pour m'enfoncer que pour me remonter le moral. Sauf ma grand-mère qui me disait que j'étais le plus beau. Vous jouez le rôle d'un acteur qui doit supplier son ami de jouer avec lui. A t-on déjà dû vous supplier pour que vous acceptiez d'interpréter un rôle ? Généralement c'est moi qui supplie les comédiens dans les pièces que je mets en scène. Ça m'est arrivé aussi d'être à la place de celui qui se fait désirer et qui fait durer le plaisir mais je me suis rendue compte que ça fait souffrir l'autre et que ça peut rapidement se retourner contre vous. Il y a peu de temps, j'ai planté un réalisateur belge à qui j'avais donné mon accord pour jouer dans son film. J'ai vite senti qu'un malaise s'installait entre nous suite à cet abandon. C'est terrible quand on écrit un rôle sur mesure pour un acteur parce que s'il refuse ça n'a plus aucun sens. Pour vous, quel est le message principal du film ? La fin du film n'est pas exactement celle que nous avons tourné sur le plateau. L'histoire est assez moralisatrice. Elle montre que si vous voulez obtenir les choses en vous servant des gens et non par amour du projet, vous aurez à en payer le prix. Ça ne sert à rien de chercher à obtenir quelque chose de la mauvaise façon. Quels sont vos projets ? Je n'ai pas envie de remonter sur les planches pour le moment. Je viens de terminer le tournage d'une comédie romantique indépendante américaine. J'ai d'autres projets mais je n'en dirai pas plus. Surprise... Emilie Maucq
 

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