Connue pour ses rôles dans Attenberg (2010) et Assassin’s Creed (2016), Ariane Labed fait désormais ses débuts en tant que réalisatrice avec September Says.
Un récit gothique sur le passage à l’âge adulte qui suit deux sœurs inséparables : la dominante September, interprétée par Pascale Kann, et la docile July, jouée par Mia Tharia. Après un incident à l’école, leur mère célibataire Sheela, incarnée par Rakee Thankrar, emmène les filles dans une cabane isolée en pleine campagne irlandaise. Ce qui devait être un nouveau départ se transforme rapidement en un complot étrange et sinistre, mettant leur relation fraternelle à rude épreuve.
Les dangers de l’isolement
Tout comme dans le roman de Daisy Johnsson, July admire profondément September. Bien qu’elles aient moins d’un an d’écart, c’est September qui dicte leur mode de vie en tout point. Elles mangent la même chose, vont à l’école sur un seul vélo et partagent même un téléphone portable. Leur isolement les rend marginales aux yeux de leurs camarades. C’est surtout July qui en souffre, ce qui pousse September à se comporter comme une protectrice acharnée, éliminant quiconque tente de lui faire du mal. Mais elle ignore que July aspire à s’émanciper de son influence.
Ainsi, leur relation fusionnelle se transforme rapidement en un jeu de pouvoir oppressant, où September détient toutes les cartes. Il ne s’agit que d’une question de temps avant que l’histoire ne prenne un tournant radical.
Un drame teinté d’horreur
Cette tension sous-jacente confère au film une atmosphère de thriller psychologique, bien qu’il soit classé comme un drame. L’intensité de leur univers est accentuée par l’utilisation de formats d’image en 16 mm et 35 mm, créant une sensation de claustrophobie. La mise en scène et le jeu des acteurs explorent les zones sombres des liens familiaux. Pascale Kann interprète September non seulement comme une figure obsessionnelle, mais aussi comme une jeune fille en manque d’amour maternel. Son rôle de grande sœur laisse ainsi transparaître un subtil instinct maternel, rendant son personnage vulnérable et profondément humain.
Cependant, c’est sans doute le contraste avec l’interprétation retenue et timide de Mia Tharia qui constitue la plus grande force du film. Le désir refoulé de July d’accéder à son indépendance s’oppose frontalement à la peur de September de la voir s’éloigner, générant une dynamique captivante qui maintient le spectateur en haleine.
L’amour inconditionnel comme arme
La peur de se perdre elle-même, et de perdre sa sœur, pousse September à des actes de plus en plus désespérés, l’isolant davantage de la réalité. Cette spirale est renforcée par leur mère, Sheela, qui, après l’incident à l’école, se coupe progressivement de ses filles. L’interprétation de Rakee Thankrar offre un portrait poignant de la solitude des mères célibataires. Bien que son personnage s’efface, son influence résonne à travers chaque scène.
Ironiquement, les trois personnages cherchent à retrouver l’amour perdu – qu’il soit tourné vers soi ou vers les autres – au sein même de leur isolement. Le spectateur ne prend pleinement conscience de leur angoisse profonde d’être abandonnées que lorsque September exploite sa vision de l’amour inconditionnel d’une manière inquiétante, dans le but d’obtenir ce qu’elle veut de July.
Avec September Says, Ariane Labed joue sur nos peurs primaires et propose une vision novatrice du drame et de l’horreur : la véritable menace ne vient pas de l’extérieur, mais se cache en nous.
Le film sortira le 16 avril dans les salles obscures. Cliquez ici pour découvrir sa programmation.
Texte écrit par Federica Alexakis