Découvrez les années 90 à travers les yeux d'Anthony, un adolescent à succès. Le cadre est très français, mais 'Leurs Enfants Après Eux' semble plutôt américain. Cette épopée des frères Boukherma sur le passage à l'âge adulte est ambitieuse à tous points de vue.
Nous sommes dans les années 90. Anthony (Paul Kirchener) grandit à l'ombre d'une industrie en déclin dans le nord-est de la France. Son père est un alcoolique violent et les bêtises qu'il fait avec son cousin sont les rares points positifs de son existence. Lorsque les deux sont invités à une fête par une jolie fille appelée Steph (Angelina Woreth), Anthony vole la moto de son père pour s'y rendre. La fête est bientôt bouleversée par l'arrivée de Hacine (Sayyid El Alami), un jeune homme tout aussi perturbé.
Au Festival international du film francophone (FIFF) de Namur, vous pourrez admirer jusqu'à trois fois l'adaptation du livre « Leurs Enfants Après Eux ». Cette épopée du passage à l'âge adulte aborde de grands thèmes qui tiennent à cœur aux organisateurs de cette 39e édition. Dans quelle mesure sommes-nous semblables à nos parents et comment pouvons-nous devenir meilleurs qu'eux ? Avons-nous notre mot à dire sur nos problèmes ou sont-ils le fruit d'un désavantage économique ?
De petites questions sont également abordées dans ce voyage nostalgique. Que signifie la liberté pour un adolescent déprimé mais excité ? Leurs Enfants Après Eux » est, selon certains, trop long et superficiel. De même, il s'agit d'un coup de massue émotionnel.
Le rêve américain en français
Ludovic et Zoran Boukherma - les versions Française Adil et Bilall en quelque sorte - avaient promis de livrer un film ambitieux inspiré des grands succès américains avec leur adaptation du livre du même nom. À cet égard, « Leurs Enfants Après Eux » est plus que réussi ; le résultat est un voyage dans les années 1990 à la Forrest Gump, avec une bande sonore américaine, des images dynamiques et un montage rapide.
Les réalisateurs font constamment référence aux grands films américains. Pour commencer, la scène d'ouverture est tirée presque mot pour mot de « Mud » (2012) de Jeff Nichols. Le film « Taxi Driver » (1976) de Scorsese transparaît dans la manière dont le directeur de la photographie Augustin Barbaroux cadre la mobylette. L'intrigue romantique rappelle « Licorice Pizza » (2021) de Paul Thomas Anderson et il y a plus d'une référence à « Footloose » (1984) - par exemple, l'interprétation du plan iconique des pieds qui dansent.
Pendant ce temps, les personnages aspirent littéralement à aller de l'autre côté de l'océan. Anthony dit qu'il veut déménager en Amérique pour rire et danser tous les jours. Il est loin de se rendre compte que son rêve américain découle d'une mondialisation omniprésente ; la même mondialisation qui a neutralisé l'industrie dans son arrière-cour. Lorsqu'il chante à tue-tête avec les Red Hot Chili Peppers, il applaudit en fait l'une des raisons pour lesquelles sa famille est dans la misère.
L'art imite la vie
Malgré le ton mélodramatique de « Leurs Enfants Après Eux », il y a un souci du détail. Lorsque Hacine tient une cigarette allumée dans sa main brûlée, on ne peut s'empêcher de lire une forme de borderline entre les lignes. Lorsque la relation d'Anthony menace de s'effondrer et que le garçon tente désespérément de garder la lumière du détecteur de mouvement allumée en agitant maniaquement les bras, on ne peut s'empêcher d'avoir pitié de lui.
Mais le film aurait beaucoup moins d'impact sans les excellentes performances de ses acteurs. L'acteur principal Paul Kirchener (22 ans) a mérité le prix Marcello Mastroianni du meilleur jeune acteur à Venise. Son père et sa mère étant des acteurs français de renom, il a du pain sur la planche. Le fait qu'il n'ait pas voulu suivre leurs traces au départ, mais qu'il le fasse aujourd'hui - et avec brio - établit un parallèle surprenant entre les thèmes du film et la vie réelle.
Sayyid El Alami est également convaincant dans le rôle de Hacine, un personnage tourmenté. Il parvient à tirer une performance à plusieurs niveaux d'un personnage qui aurait mérité un peu plus d'élaboration. Le fait qu'il n'ait pas été récompensé est davantage imputable au scénario qu'au jeune acteur. Ludivine Sagnier et Gilles Lellouche, qui jouent respectivement la mère et le père d'Anthony, apportent une sensibilité supplémentaire.
Le livre « Leurs Enfants Après Eux » a beaucoup à dire et il vaut la peine de le lire attentivement. Peut-être y reconnaîtrez-vous quelque chose de votre propre vie. Après tout, tout le monde a été jeune un jour et tout le monde rêve de l'avenir. Vous aussi, vous en rêvez sûrement.
Journaliste Cinenews : Senne Cambré
