L'Abbé Pierre n'a pas que fondé Emmaüs et participé à d'amusantes émissions télévisées. Il fut aussi militaire, résistant, député et, à sa façon, révolutionnaire. Un biopic documenté, soigné et mouvementé retrace ces vies et ces combats.
Sacré 16 fois «personnalité préférée des Français», ce qui est moins que le Commandant Cousteau mais plus que Jean-Jacques Goldman, l'Abbé Pierre garde auprès du grand-public une image de vieil ecclésiastique engagé dans la lutte contre la pauvreté par ailleurs très souvent invité sur les plateaux de télévision. Décédé en 2007 à l'âge de 94 ans, sa longue vie a toutefois été beaucoup plus mouvementée que ses imitations en mode « ami des stars » par Les Guignols de l'Info pouvaient laisser penser.
Né dans une famille bourgeoise sous le nom de Henri Grouès, il a été mobilisé en tant que sous-officier au début de la Seconde Guerre Mondiale, avant de devenir aumônier recueillant des enfants juifs et participant activement à la Résistance. La guerre finie, il est un temps député à l'Assemblée Nationale et fonde ensuite, en 1949, le mouvement Emmaüs, luttant contre la pauvreté et pour le droit au logement.
C'est durant le terrible et très froid hiver de 1954 que l'Abbé Pierre devient véritablement célèbre, alors qu'il lance sur les ondes de Radio-Luxembourg un appel aux dons destiné à aider les sans-abris. 500 millions de francs sont récoltés, dont 2 issus des poches de Charlie Chaplin. C'est inattendu, c'est énorme et dans la foulée, se construisent des HLM et s'adopte une loi qui interdit les expulsions locatives durant l'hiver.
Cet Hiver 54 a déjà fait l'objet d'un film, en 1989, avec Lambert Wilson dans le rôle de l'Abbé Pierre. Avec une « Une Vie de Combats », c'est par contre la première fois qu'un projet cinématographique s'attaque à une biographie plus complète de ce véritable héros national. C'est à Frédéric Tellier que l'on doit ce « biopic » alliant comme les meilleurs titres du genre reconstitutions minutieuses, grand spectacle et souffle historique.
Ayant reçu l'accès aux archives de la Fondation Abbé Pierre et du mouvement Emmaüs et aidé par des journalistes spécialisés au moment de l'écriture du scénario, Tellier s'est véritablement donné pour mission de raconter « Les Onze Vies de l'Abbé Pierre », ce qui était d'ailleurs le titre de travail de son projet.
Actif au cinéma et à la télévision depuis 25 ans, Frédéric Tellier est surtout connu pour ses deux précédents films : L'Affaire SK1 (2014), polar retraçant la traque du tueur en série Guy Georges dans les années 90, et Sauver ou Périr, gros succès de 2018 sur la rééducation d'un pompier se réveillant à l'hôpital des grands brûlés après une intervention dramatique.
Dans le rôle de l'Abbé Pierre, on retrouve Benjamin Lavernhe, complètement habité, et Emmanuelle Bercot dans celui de Lucie Coutaz, durant de nombreuses années la gestionnaire des centres d'hébergements Emmaüs.
Voilà donc un grand film de guerre, de combats, d'indignations et aussi, bien entendu, d'espoirs.
