'Terminator 2'! 'Jurassic Park'! 'Saving Private Ryan'! 'The Bourne Identity'! 'Signs'! 'Master and Commander'! Pas mal de monde tuerait père et mère afin de pouvoir afficher le même palmarès que Stefen Fangmeier. Ce Texan s'est bâti une solide réputation depuis le début des années 1990, en tant qu'expert en matière d'animation assistée par ordinateur et autres effets spéciaux. Ce n'est donc pas une surprise si, pour son premier job en tant que réalisateur, il a opté pour un film faisant appel à ses expériences passées. 'Eragon' s'attarde sur la relation entre un jeune gars banal et son étonnant animal domestique: un dragon.
Nous avons déjà vu des dragons dans une poignée de film déjà existants. Qu'est-ce qui rend le vôtre unique?
Fangmeier: Le personnage. Dans des films tels que 'Le règne du feu', les dragons sont des bestioles visqueuses, crachant du feu; dans 'Dragonheart', c'est un personnage parlant, tout droit issu d'un dessin animé. Je voulais absolument me situer quelque part au milieu. Saphira, le dragon, à un karma fortement bestial mais également une forte personnalité. Elle a son propre point de vue. Le fait qu'elle puisse communiquer télépathiquement avec Eragon est unique.
'Eragon' repose principalement et surtout sur la prestation d'un jeune gars de 15 ans, Christopher Paolini. Quel est son apport personnel au film?
Fangmeier: Il a suivi le développement du scénario et a donné régulièrement son opinion, ses remarques. Ce n'était naturellement pas toujours facile pour lui, car il est encore jeune et tellement créatif. Pendant un tournage, tu dois toujours faire des sacrifices. Il y a toujours des choses qu'il faut abandonner car elles ne trouvent finalement pas leur place. En même temps, je sais qu'il est sur un petit nuage vu qu'une partie de ses trouvailles atterrira quand même sur grand écran.
Vous avez collaboré avec des pointures telles que James Cameron, Steven Spielberg, Jan de Bont et M. Night Shyamalan. Est-ce suffisant comme expérience pour oser se lancer dans une première réalisation?
Stefen Fangmeier: Cela permet de comprendre en tout cas comment ce genre de films se met sur pied. Le grand point d'interrogation était de savoir si je serais capable de m'en sortir avec la direction d'acteur, et avec la construction d'un récit qui tienne la route. La relation avec les acteurs, à mon grand soulagement, s'est mise en place presque d'elle-même. Les problèmes rencontrés ont plus été d'ordre logistique.
La réalisation était-elle votre rêve depuis toujours?
Fangmeier: A vrai dire... non. J'ai fait des études portées sur l'informatique, et lorsque le temps de passer aux choses concrètes sur base de ces connaissances s'est présenté, je me suis dit que je préférais travailler l'image sur ordinateur. Mon centre d'intérêt initial était plutôt orienté vers les films d'animation et je me suis attelé à quelques projets. Il y a quatre ou cinq ans, je me suis rendu compte que travailler avec des acteurs m'attirait vraiment. J'ai donc dû découvrir tout ça par moi-même.
'Eragon' est la première partie d'une trilogie. Le tournage des suites est-il déjà planifié?
Fangmeier: Je dois avouer honnêtement que je ne m'en occupe pas encore. Je n'ai pas trop envie de trop penser au futur. Je n'ai cessé de conseiller à Ed Speleers, le jeune acteur principal de 'Eragon', de se concentrer sur le moment présent, et c'est également ce que j'aime faire. Mais je sais, bien entendu, que le niveau d'attente est plutôt élevé, la 20th Century Fox ayant investi pas mal d'argent dans ce film, basé de surcroit sur un livre plus que populaire. Mais avant de penser à une suite, il faut d'abord être certain que le premier trouve son public. Et, seulement si cela se concrétise, j'envisagerai de réaliser un second volume.
Si la Fox a tellement investi dans 'Eragon', c'est également car elle espère obtenir avec ce titre un succès de l'ampleur de la saga 'Harry Potter'. Ca ne vous met pas trop la pression?
Fangmeier: Je savais d'avance que l'enjeu était important. Mais si je n'avais pas pu faire face à cela, cela ne valait pas la peine de m'impliquer. J'ai pris le risque vu que je croyais à fond en cette histoire. J'ai vu beaucoup de films à grand spectacle qui ne bénéficiaient pas d'un bon scénario, et cela fait toute la différence. Je me suis attelé à 'Eragon' pour surprendre le public, pas pour faire des effets qui le scotchent au fauteuil. Le problème avec des films comme 'Troy' et 'Alexander' c'est qu'ils laissent de marbre, l'empathie avec les personnages est absente. Avec 'Eragon' il en va autrement...
Aussi bien 'Harry Potter' que 'Le Seigneur des anneaux' ou 'Les chroniques de Narnia' ont cartonné. Avez-vous une idée de ce qui suscite auprès du public cette faim de 'fantasy'?
Fangmeier: D'après moi c'est lié à l'état du monde d'aujourd'hui... Après le style 'fantasy', ce sont les comédies qui remportent la timbale, et cela en dit long. Les gens vont probablement au cinéma pour échapper à la réalité du quotidien. Il est possible également de faire cela en lisant un bon bouquin, en écoutant une chouette plaque ou encore en allant se déguster un café le samedi après-midi, mais un film apporte malgré tout un petit quelque chose en plus. C'est de la fuite pure, et cela donne le cran pour tenir le coup.
Par Ruben Nollet