L'avantage à s'appeler Tim Burton, c'est d'avoir une horde de fans prête à tout pour retrouver les grands frissons d'extase provoqués par des chefs-d'oeuvre tels que 'Vincent' ou 'Frankenweenie' - pour les courts - et sans être exhaustif, 'Edward aux mains d'argent', 'Batman le défi' ou encore 'Mars Attacks'... et dans une moindre mesure 'Big Fish' et 'Charlie et la chocolaterie' du côté des longs-métrages. Car il est clair que notre homme ne peut se mesurer qu'à lui-même! Pas moins de bonheur du côté de ses évasions "animesques", que ce soit en tant que producteur ('L'étrange Noël de Monsieur Jack'), ou grand ordinateur ('Les noces funèbres'). Tout cela pour enfin et laconiquement, affirmer tout le talent de ce trublion gothico-romantique.
Burton sandwich
Vu sa maestria visuelle, son sens de l'usage musical, quoi de plus naturel et excitant que de retrouver Burton aux commandes de 'Sweeney Todd, le diabolique barbier de Fleet Street'... Soit un monstrueux succès du music hall, datant de la fin des années '70. Un récit d'épouvante, inspiré par une légende urbaine du 19e siècle moultes fois récupérée, notamment par Charles Dickens. Un récit grinçant, narrant la vengeance d'un notable (Benjamin Barker) tombé en déchéance suite à de fausses accusations. Il y perd sa femme (qui se suicide après un viol), et sa fille. Mais le martyr revient sous les traits d'un barbier... écorcheur, adepte de la loi du talion et du rasoir. Ses victimes finissent en chair à tarte! Un récit trash à souhait, des acteurs sur mesure (Johnny Depp, Helena Bonham Carter, Alan Rickman), des délires imagesques d'une teneur sombre et d'inspiration solide, soit la patine baroque de la Hammer combinée à celle de Mario Bava, et des chansons en cascade (interprétées par les acteurs)... Oui, 'Sweeney Tood' a de quoi filer le tournis, mais également une sacrée envie de foncer dans les salles obscures. Une impulsion renforcée par le refus de Tim Burton de mettre de l'eau dans son vin, lorsque la MPAA lui est tombée dessus, menaçant d'une interdiction aux moins de 17ans non accompagnés! Ouais, sa pelloche dégouline d'hémoglobine et fait dans la violence très graphique; oui l'histoire est glauque à souhait... Mais pas question de charcuter son film, il laisse ça à son antihéros! Cool, notre chouchou semble avoir retrouvé sa paire de burnes.
Elfman power
Petite surprise malgré tout: Danny Elfman, fidèle parmi les fidèles de Burton, ne sera pas aux commandes de l'opus le plus chantant de son pote de plateau de tournage. Mais quoi de plus normal, vu que la musique provient en direct du spectacle créé en 1979 par Stephen Sondheim... Une situation plutôt particulière vu que les deux hommes ont bossé de concert sur la B.O. de 'Dick Tracy' en 1990. Une peccadille me direz-vous. C'est peut-être un détail pour vous, mais pour moi ça veut dire beaucoup: Burton rend d'une certaine manière hommage à celui qui lui a procuré un plaisir énorme lors d'un séjour à Londres en 1980, qu'il a mis à profit pour voir à plusieurs reprises 'Sweeney Tood' sur les planches du Royal Drury Lane Theatre. Voilà un mélange émouvant de respect et de purisme.