Inland Empire - Chronique Cinema

Une femme est en danger. L'accroche du nouveau David Lynch constitue le seul pitch un tant soit peu valide pour présenter cette oeuvre totalement barrée et irracontable. Film-puzzle d'une maîtrise inouïe, 'Inland Empire' est un extraordinaire objet théorique de cinéma sur le cinéma. En quelque sorte, il constitue le prolongement de 'Mullholland Drive' dans une mise en abîme étouffante. Il se penche sur la matière filmique elle-même, la genèse de sa création et l'intimité hypnotique de sa relation avec le spectateur. En plus de nous perdre entre rêve et réalité (est-on dans une fiction? le tournage d'une fiction? un tournage fantasmé?), Lynch balaie tous les repères temporels logiques: nous ne sommes pas dans un temps de récit mais bien dans une chronologie de réalisateur, tournant les scènes dans un ordre différent de celui de l'histoire. Et certains personnages semblent avoir conscience de cette fusion magique entre réalité et fiction. Mais 'Inland Empire' n'est pas une oeuvre abstraite et stérile: le travail hallucinant de l'image et du son et à la prestation hallucinée de Laura Dern en font une expérience sensorielle radicale, viscérale, anxiogène. Rideaux rouges, lumières tamisées, longs couloirs entre deux-mondes, scènes zarbi -ici, une maisonnée de personnages à têtes de lapin... ces incontournables de l'univers lynchien vous plongeront une nouvelle fois dans le cauchemar complexe de ses obsessions inquiétantes. Lynch est un grand malade? Par pitié, qu'on ne le soigne pas! Film: 5/5 - Soundtrack: 4/5