En novembre, sortira en salles On vous croit, un drame judiciaire dont le format presque carré capture la performance brute et bouleversante de l’actrice belge Myriem Akheddiou. Elle incarne une mère dont l’enfant a été victime d’abus. De tels faits sont rarement dénoncés, et lorsqu’ils le sont, la parole des victimes est souvent mise en doute — encore plus rarement reconnue par la justice. Ce film apporte un contrepoint clair et puissant : nous vous croyons.
Le réalisateur belge Arnaud Dufeys signe le film avec la scénariste française Charlotte Devillers. Ensemble, ils nous entraînent dans une audience tendue où une mère de deux enfants risque de perdre la garde de ces derniers.
Présenté plus tôt cette année au 75? Festival de Berlin, On vous croit arrive enfin sur grand écran en novembre. C’est le genre de film que l’on pourrait facilement passer à côté : une histoire simple, un seul lieu, une mise en scène discrète. Pourtant, ce moyen métrage de 1h18 vous happe avant même que vous ne vous en rendiez compte.
Des performances magistrales
Croyez-le : la force du film réside dans ses interprétations. Si la mise en scène demeure statique, elle sert avant tout à concentrer notre attention sur le jeu des acteurs. La caméra ne quitte presque jamais le visage d’Akheddiou, et pourtant, l’ennui ne s’installe jamais.
La comédienne bruxelloise, déjà remarquée dans Titane (2021) de Julia Ducournau et Le Jeune Ahmed (2019) des frères Dardenne, confirme ici l’ampleur de son talent. À travers de simples expressions, elle transmet à la fois la peur, la dignité et la détermination d’une femme piégée dans un système qui doute d’elle. Souvent, elle ne peut que réagir à ce qu’on lui dit — et pourtant, dans cette immobilité, elle fait surgir une panique viscérale et contenue. Le danger est constant : chaque tremblement, chaque émotion trop visible peut être utilisée contre elle, pour la dépeindre comme une mère instable. Ne lui reste alors qu’à encaisser, encore et encore, tandis que la machine judiciaire poursuit son cours implacable.
Face à elle, Laurent Capelluto livre une prestation glaçante. Connu pour ses rôles dans Mr. Nobody (2009) de Jaco Van Dormael et Amour (2012) de Michael Haneke, il campe ici un homme qui sait parfaitement ce qu’il a fait, mais qui reste persuadé qu’il s’en sortira grâce à son aplomb et à sa colère contenue. Son interprétation suscite une tension presque insoutenable, d’autant plus qu’elle semble tristement crédible.
Une mise en scène oppressante
Si la réalisation paraît minimaliste, elle n’en demeure pas moins essentielle à la force du récit. La photographie de Pépin Struye enferme littéralement les personnages dans des cadres étroits, aux tons blanchâtres, gris et délavés. Quand la famille ne déambule pas dans le décor stérile du tribunal, elle se retrouve dans un bureau suspendu au-dessus de la ville, comme coupée du monde réel.
Tout, jusqu’aux dialogues, semble distant, presque désincarné. Pour un observateur extérieur, il est facile de se perdre dans la confusion des récits contradictoires. Mais pour le personnage d’Akheddiou, la vérité est limpide, brûlante, insupportablement ignorée.
On vous croit agit ainsi comme un geste de soutien envers toutes celles et ceux qui ont réellement subi des abus. On peut douter de sa capacité à changer les choses, car le film se contente d’observer, sans surenchère, une tranche de réalité. Pourtant, les chiffres qui apparaissent à la fin du film parlent d’eux-mêmes. Agir reste difficile, et croire qu’il existe un problème est souvent le premier pas. Ce film, lui, ne laisse aucun doute : oui, il y a un problème, et nous vous croyons.
Senne Cambré
