Ainsi, Luca Guadagnino crée le sentiment estival ultime. - Actu Cinema

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Ainsi, Luca Guadagnino crée le sentiment estival ultime.
Un été, une maison de campagne, un amour d’été. Avec sa trilogie du Désir – Amore (2009), A Bigger Splash (2015) et Call Me by Your Name (2017) – le réalisateur Luca Guadagnino nous donne accès à un été infini, plein de possibilités et d’opportunités. Et n’est-ce pas exactement ce que nous cherchons lorsque nous regardons des films ? Pouvoir rêver sans fin dans un monde éloigné du nôtre ? Mais quelle est donc sa vision unique, et quel impact celle-ci a-t-elle sur nous, spectateurs ?
 
« Ce soir a été une merveilleuse expérience de contact humain »
 
Dans Amore, le troisième long métrage de Guadagnino, Tilda Swinton incarne Emma, une immigrée russe mariée à un magnat du textile milanais. Mais il semble qu’il n’y ait plus de place pour ses émotions. Alors qu’elle s’enfonce dans la solitude au sein du luxueux manoir de sa belle-famille, son intégration se transforme peu à peu en renoncement à elle-même. Lorsqu’elle découvre que sa fille est attirée par les femmes, elle trouve le courage de rechercher la version oubliée d’elle-même. Dans cette quête, elle rencontre le chef cuisinier Antonio (Edoardo Gabbriellini), dont les plats s’insinuent dans son esprit. La chaleur et l’épanouissement de l’été sont représentés par une explosion de saveurs qui éveillent les sens d’Emma. Dans la scène où ils commettent l’adultère, le montage associatif de Guadagnino nous permet de vivre pleinement les extases de l’amour. Il les illustre de manière particulièrement explicite. Par ses choix stylistiques, il devient évident que, tout comme ses personnages, il est assez audacieux pour choisir la vie et l’amour dans l’air du temps.
 
 
La réalisation en elle-même n’est certes pas parfaite, mais on oublie vite ces imperfections face à la performance riche de Tilda Swinton, qui, dans l’univers froid de l’élite italienne, aspire à une vie sensorielle où les sentiments ne doivent pas être réprimés.
 
« Le monde n’est pas prêt pour ton honnêteté »
 
L’impact sensoriel de l’été prend une autre tournure dans A Bigger Splash, un thriller sensuel et baigné de soleil – inspiré de La Piscine (1969, Jacques Deray). Quatre amis passent l’été dans une villa sur l’île italienne de Pantelleria, près de la Sicile. Tilda Swinton revient sous les traits de Marianne Lane, une célèbre rock star ayant perdu sa voix. Elle séjourne avec son compagnon actuel, Harry Hawkes (Ralph Fiennes), jusqu’à ce qu’ils soient rejoints par son ex, Paul De Smedt (Matthias Schoenaerts), et sa fille Penelope Lannier (Dakota Johnson). Plus ils passent de temps ensemble, plus ils se sabotent mutuellement – et eux-mêmes – à la recherche d’un sentiment perdu d’authenticité, jusqu’à la jalousie, aux triangles amoureux et même au meurtre. Guadagnino utilise ici le cadre estival – principalement la piscine – comme un miroir brutal, révélant toutes sortes d’intrigues et de désirs. L’amour véritable semble impossible : là où il existe, il est éclipsé par des blocages intérieurs, de l’orgueil et d’anciennes blessures.
 
 
« Appelle-moi par ton nom et je t’appellerai par le mien »
 
Mais s’il y a bien deux personnes qui incarnent ce que signifie l’amour véritable – et impossible – ce sont Elio (Timothée Chalamet) et Oliver (Armie Hammer). Été 1983. Le jeune Elio, 17 ans, séjourne avec ses parents dans une villa de campagne en Italie. Son père est professeur, sa mère traductrice. Arrive alors Oliver, un Américain de 24 ans venu travailler pendant six semaines à sa thèse, sous la supervision du père d’Elio. Ce qui suit est un été enivrant pour les deux garçons, qui explorent leurs désirs réciproques. Par un regard, une caresse, une déclaration, ils tentent de mettre des mots sur ce qu’ils ressentent. Le décor – encore une fois un manoir impressionnant – cache qui ils sont vraiment, leur offrant à la fois un refuge et un terrain pour se découvrir. Lorsqu’Oliver appelle Elio pour la première fois par son propre prénom, le spectateur comprend que ce lieu secret est le seul où ils peuvent être eux-mêmes.
 
 
L’été leur offre la liberté d’une identification totale : ne faire plus qu’un avec l’autre. Call Me by Your Name est bien plus qu’une romance LGBTQ. Ce film touche quiconque a déjà aimé – ou aimera un jour. Guadagnino y dépeint l’amour comme une fantaisie intensément réelle. Mais comme beaucoup d’amours d’été, cela s’arrête malheureusement là : le départ inévitable d’Oliver fait ressurgir la réalité douce-amère.
 
N’est-ce pas ce qui nous arrive à chaque fois que nous sommes au cinéma ? Les lumières s’éteignent – et dès que le film commence, notre inconscient s’emballe – on se perd dans l’histoire, on vit avec les personnages, on oublie momentanément qui nous sommes. Mais une fois sortis de la salle, la magie s’efface et nous replongeons dans la réalité quotidienne. Comme si ce que nous venions de voir n’était qu’un souvenir fugace, niché quelque part dans notre esprit.
 
« Chaque film doit être une expérience qui transporte le public dans un autre monde »
– Luca Guadagnino
 
Chaque fois que nous appuyons sur « play », les films de Luca Guadagnino nous montrent à quel point la frontière entre ce que nous sommes et ce que nous pourrions être est mince, surtout en été. Que cela soit pour le meilleur ou pour le pire dépend entièrement de nous. Mais plus que tout, nous avons la possibilité de nous redécouvrir.
 
Privés de notre routine familière, nous sommes forcés de nous confronter à nos pensées, nos désirs et nos rêves. Tout ce que nous n’osons pas faire le reste de l’année, nous le tentons maintenant. Pourquoi ? Parce que personne ne nous connaît.
 
En somme, pour un temps limité, nous avons la possibilité d’être quelqu’un d’autre. Que ce soit une expérience sensorielle, une confrontation ou une cachette : les vacances d’été nous offrent la chance de mener une double vie. Quoi de plus excitant que ça, n’est-ce pas ?
 

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