Le festival a démarré avec sa traditionnelle cérémonie d’ouverture, présentée cette année par une Virginie Efira stressée mais digne. Après les discours et présentation du jury, un hommage fut rendu à Forest Whitaker a qui fut remise une Palme d’Or d’honneur et, au vu de la carrière de l’acteur (qui avait remporté le prix d’interprétation en 1988 pour BIRD de Clint Eastwood), c’est entièrement mérité. Après un interlude musical joué par Vincent Delerm, Efira annonce un discours surprise du président ukrainien Volodymyr Zelensky. Durant une dizaine de minutes, Zelensky a rappelé les dramatiques événements de déroulant actuellement dans son pays et a exhorté le monde du cinéma à ne pas se taire face au drame en martelant cette phrase qui résonne : « Il faut un nouveau Chaplin qui prouvera que le cinéma n’est pas muet ». Poignant.
La transition ne fut pas simple mais après avoir conclu la cérémonie, place au film d’ouverture : COUPEZ ! de Michel Hazanavicius. Ce dernier, initialement intitulé Z (COMME Z) en hommage aux films de la même lettre, a été renommé suite à la connotation qu’a pris symboliquement le Z durant la guerre en Ukraine. COUPEZ ! est un remake d’un film japonais ayant créé une certaine sensation il y a 4 ans : ONE CUT OF THE DEAD. Pour ceux qui auraient eu la chance de voir l’original, la déception ne peut qu’être au rendez-vous car l’effet de surprise sera passé. Quant aux autres, cela peut fonctionner, dans sa seconde partie principalement. Le film, qui raconte le tournage chaotique d’un long-métrage en plan-séquence et fait avec peu de moyens, s’intéresse aux coulisses et à tout ce qui a foiré pendant le film. Il procure un plaisir certain mais cela reste un remake quasiment plan par plan de l’original. Difficile d’être complètement satisfait dans ce cas-là mais la découverte sera des plus sympathiques pour les novices.
Le lendemain, place à la première vraie journée de festival. Elle a débuté dès 9h avec le film d’ouverture de la Quinzaine des réalisateurs : L’ENVOL de Pietro Marcello. Le réalisateur italien a tourné en français un film un peu étrange racontant le retour du front d’un homme qui vient de perdre son épouse. Il doit s’occuper de sa fille mais l’intégration dans le village sera compliquée quand le passé reviendra faire surface. C’est un film sur l’émancipation d’une jeune fille, sur les marginaux et la douleur du deuil. L’ENVOL révèle une jeune actrice saisissante, Juliette Jouan, tout simplement sublime dans cette première expérience au cinéma.
Place ensuite à l’événement immanquable du jour, la rencontre avec l’une des plus grandes stars planétaires : l’immense (par le talent car en taille, on repassera) Tom Cruise. Animée par Didier Allouch (journaliste de Canal+), la rencontre s’est attardée principalement sur la façon de travailler de Cruise et s’il fallait retenir une seule chose c’est que pour lui, faire un film est une expérience collective durant laquelle tout le monde a son mot à dire.
Les plus chanceux ont ensuite eu l’occasion de découvrir TOP GUN : MAVERICK. Cinenews avait déjà eu l’occasion de le voir à Bruxelles avant le festival en Imax et vous aurez une critique complète mais sachez tout de même que c’est une excellente suite, un bon film (alors que TOP GUN premier du nom est un film assez jouissif mais pas très très bon scénaristiquement parlant très honnêtement), un grand spectacle assez incroyable (les scènes d’avions en Imax sont géniales), que c’est plein d’émotion (ah Val Kilmer…) et que c’est un magnifique hommage au premier. Bref, un super moment de cinéma à ne rater sous aucun prétexte.
A la place de TOP GUN : MAVERICK, place au film d’ouverture de la Semaine de la Critique, la section réservée aux premiers et seconds longs-métrages. Cette année, c’est le comédien Jesse Eisenberg qui a eu cet honneur pour son premier film en tant que réalisateur : WHEN YOU FINISH SAVING THE WORLD. Le film raconte l’histoire d’un jeune ado, Ziggy, « chanteur star » d’internet, ayant des problèmes relationnels avec sa mère et essayant de draguer une fille de sa classe ayant des centres d’intérêts bien différents. En parallèle, sa mère, directrice d’un centre d’accueil pour femmes battues, noue des liens avec le fils d’une de ses pensionnaires.
Ça a l’air assez lourd dit comme ça mais la tonalité est plutôt légère, un peu pop grâce à l’univers musical de Ziggy. Il y a un sens du drame, du dialogue. Jesse Eisenberg sait ce qu’il veut et on ne peut pas dire que son film manque de personnalité. Il a convié des acteurs de talents (Finn Wolfhard, Julianne Moore, Billy Bryk, Alysha Boe) qui sont totalement investis dans ce qu’ils font et ça se sent. Bref, on peut dire que c’est essai très concluant pour ce premier long-métrage réalisé par Jesse Eisenberg.
Pour conclure la journée, place au premier film de la compétition, LE OTTO MONTAGNE des belges Félix Van Groeningen et Charlotte Vandermeersch. Le gantois, qui co-réalise avec son épouse (généralement co-scénariste de ses films), a choisi d’adapter le roman « Huit montagnes » de Paolo Cognetti. Direction l’Italie avec un apprentissage de la langue et le choix d’un casting italien bien entendu. Ce portrait de deux amis d’enfance se retrouvant après s’être perdus de vue durant 15 ans est assez saisissant de véracité. Lucas Marinelli et Alessandro Borghi sont habités par leurs personnages, extrêmement touchants. Van Groeningen et Vandermeersch filment les alpes italiennes en leur rendant honneur. La photographie est magnifique et la montagne est clairement le personnage principal du film. Bémol, le récit tire trop en longueur ce qui donne une petite lassitude aux spectateurs. Reste au moins la beauté indéniable de l’œuvre.
