Curro sort de prison après 8 années perdues pour un braquage raté. Il aspire à retrouver sa famille, sa femme et son fils et vivre une vie normale. L'arrivée d'un mystérieux étranger va bouleverser ses plans et l'entrainer dans un voyage sombre et sans retour.??
Raul Arévalo, comédien confirmé, Goya du Meilleur second rôle masculin pour Gordos de Daniel Sanchez Arévalo et présent dans le très bon thriller la Isla Minima de Alberto Rodriguez, réalise ici son premier film et non des moindres puisque ce thriller est lauréat de 4 Goyas dont celui du Meilleur film, Meilleur nouveau réalisateur et Meilleur scénario original. On sent dans ce drame la patte d'un cinéaste qui signe des partis pris de réalisation très forts. Une image granuleuse, des tons froids, l'image de Arnau Valls Colomer achève de glacer l'ambiance.
La scène d'ouverture en plan séquence annonce la couleur narrative avec un cambriolage qui tourne mal. Le spectateur est dans la voiture, avec cet homme cadré de dos en plan rapproché. Il assiste et subit la scène avec lui, y compris la course-poursuite qui se terminera mal. Puissant.
La réussite de ce thriller est également due à des personnages brillamment incarnés dans leur chair. La fidèle Ana est magnifiquement incarnée par Ruth Diaz, récompensée pour ce rôle par le Prix de la meilleure actrice Orizzonti au Festival de Venise 2016. Curro, son compagnon qui sort de prison est interprété par le très crédible Luis Callejo, Kiki love to love de Paco Leon, mais le protagoniste le plus étrange que l'on cerne mal reste sans nul doute l'inconnu, José, superbement personnifié par l'énigmatique Antonio de La Torre, La isla Minima. Ce comédien semble imbattable pour jouer un homme au regard insondable, aux émotions impénétrables, même gâchette en main. On est dérangé par ce protagoniste dans la mesure où pendant toute la première partie du film on se demande d'où vient sa passivité, son manque d’implication dans ce couple qu'il semble pourtant avoir envie de créer avec Ana. Il court après elle sans vraiment oser aller plus loin, sans intervenir franchement. On comprendra ce personnage au fil de l’avancée du récit, suivant les bribes de sa psychologie qui nous seront données au coup par coup, comme les pièces d'un puzzle.
Même si le thriller nous tient en haleine, la durée pendant laquelle on attend de découvrir vraiment le personnage de José est un peu longue. Pendant tout un temps, on ne sait vraiment pas qui il est, ni pourquoi il est aussi peu réactif et l’on espèrerait une mise en place des événements un peu plus rapide, même si ce temps-là est peut-être nécessaire au récit pour comprendre la psychologie de cet homme. A noter que ce film cru est particulièrement dur, sans concessions.
Stéphanie Lannoy Madamefaitsoncinema.be
