Keanu Reeves est et reste un drôle de coco. Et ce n'est pas son interprétation très personnelle de l'extra-terrestre le plus célèbre au monde, Klaatu, dans le remake attendu de longue date de 'The Day the Earth Stood Still' qui va y changer quoi que ce soit.
Reeves est impressionnant dans la peau de ce mystérieux visiteur extra-terrestre, qui vient apporter un message affreux mais limpide à l'humanité: "Si vous ne commencez pas à faire attention à autrui et à votre planète, il ne restera bientôt plus rien de vous ou de votre terre!"
Reeves n'est évidemment pas le premier à donner vie à ce personnage d'icône. Il y a 57 ans, l'acteur de caractère britannique Michael Rennie se glissait dans la peau de cet alien énigmatique. L'original de 'The Day the Earth Stood Still' a grandi grâce à la réalisation nette du cinéaste de 'The Sound of Music', Robert Wise, à sa bande son au theremin omniprésent signée Bernard Hermann et un message qui sonnait à l'époque très guerre froide, pour devenir un véritable classique de la science fiction.
L'année dernière, la maison de production Twentieth Century Fox a estimé qu'il était plus que temps de doter cette histoire d'une tournure plus moderne. Les effets spéciaux sont visiblement améliorés: on ne sait pas encore à quoi le légendaire robot Gorth va ressembler dans cette incarnation-ci, mais les explosions et séquences de combat promettent d'être un véritable plaisir pour les yeux.
De plus, à l'écran, Reeves est accompagné de rien moins que la beauté de 'A Beautiful Mind', Jennifer Connelly et le fils de Will Smith, Jaden, qui avait déjà eu l'occasion de montrer ce qu'il avait dans sa manche lors de 'The Pursuit of Happyness'. Dans le fauteuil du réalisateur, Scott Derrickson, l'homme qui avait surpris ses amis et détracteurs avec 'The Exorcism of Emily Rose'.
Lorsque Reeves vient présenter son dernier film à Amsterdam, il fait très forte impression. Il faut savoir que l'acteur de 'A Scanner Darkly' a tout sauf une bonne réputation auprès des journalistes. C'est ainsi que nous avons déjà eu l'occasion de le voir aussi enthousiaste qu'une plante comateuse aux côtés de Sandra Bullock durant la conférence de presse de 'The Lake House'.
Peut-être que cela venait alors du genre de film dont il assurait la promotion, car cette fois, il est particulièrement éveillé. "Oh, vous exagérez. Je viens juste de rentrer de vacances, et tant que vous ne me posez pas de questions stupides, je resterai très positif." Nous voilà prévenus!
Connaissiez-vous bien le film d'origine, comme des millions de fans de cinéma?
Keanu Reeves: Je l'avais vu quand j'étais très jeune, et je l'avais déjà trouvé fantastique à l'époque. En plus, c'était super intéressant de comparer mes impressions d'alors avec celles de maintenant. Ce n'est qu'en le revoyant il y a quelques années que je me suis rendu compte combien il était subversif. Différentes choses y sont dénoncées: le rôle des médias, la création artificielle de l'angoisse, et j'en passe. Ce sont évidemment des choses que je n'avais pas comprises à l'époque. Mais ce que je voudrais simplement dire, c'est ceci: il s'agit d'un film terriblement courageux qui nous a inspirés Scott et moi à en faire un remake fantastique.
L'original a quand même l'air un peu dépassé, non?
Keanu Reeves: C'est vrai. C'est surtout le message à la fin du film qui représente un énorme défi. Ca revient en fait à dire que les êtres extra-terrestres donnent une sérieuse leçon à l'humanité. Et leur message est assez ironique: "Vous êtes en train de tout détruire. Arrêtez, ou nous vous détruisons!" (Rit)
Comment avez-vous abordé une icône comme Klaatu?
Keanu Reeves: Dans l'ancienne version, il était présenté de manière terriblement idéalisée. Il possédait même des traits christiques. Il était plus humain qu'humain. J'ai essayé d'adapter ça. Je l'ai vécu comme un être venu d'ailleurs qui découvre en cours de route ce que cela signifie 'être humain'. Par ailleurs, je rappelle à plusieurs reprises durant le film que mon corps humain n'est pour moi qu'un contenant.
Que voulez-vous dire?
Keanu Reeves: C'est bien que vous me le demandiez: c'est l'élément qui me procure le plus de plaisir. Je pense qu'en principe, Klaatu ne possède pas de corps. Il est une source d'énergie qui peut se déplacer de diverses manières. J'ai essayé de le rendre comme un être inhabituel qui lutte avec sa nouvelle situation.
Si je comprends bien votre Klaatu est plus sombre que celui de l'original?
Keanu Reeves: Dans notre version, il a l'air un peu plus sinistre. Il n'y avait rien de dérangeant avec le film d'origine, mais l'approche chaude, aimante semblerait aujourd'hui incroyablement naïve.
Keanu Reeves: Evidemment, je crois en des êtres extra-terrestres. Est-ce que ce ne serait pas incroyablement naïf d'imaginer que nous sommes les seuls êtres vivants, capables de ressenti dans l'univers? Je ne veux pas dire que nous allons bientôt rencontrer des aliens, mais la possibilité existe, je ne le nierai jamais.
Pourquoi avez-vous décidé, pour la première fois dans votre carrière, de vous attaquer à un remake?
Keanu Reeves: L'original reste un film époustouflant qui raconte une histoire fabuleuse. Par ailleurs, les thèmes qui y sont développés sont encore toujours d'actualité. Et puis, ça m'a semblé un point de départ fantastique pour un drame difficile. Le fait que Scott, le réalisateur, ait été terriblement passionné par le projet et que j'ai trouvé le scénario fantastique, ça a évidemment aussi aidé. Notre version part du point de vue que l'humanité a atteint un point de rupture. Partout nous voyons les conséquences de notre terrible attitude vis à vis de la nature. Ce n'est que maintenant que nous posons la question: "Sommes-nous prêts à changer?" Le film fonctionne aussi comme un miroir face à notre société.
Ca ne vous énerve pas cette vague constante de remakes?
Keanu Reeves: Je ne suis absolument pas un fan de remakes. Lorsque j'ai rencontré Scott chez lui et que j'ai discuté avec le scénariste, j'ai constamment posé la même question: "Pourquoi est-ce qu'on referait un film aussi fabuleux?" Ils sont parvenus à me convaincre qu'un classique de cette trempe méritait une seconde vie.
Y a-t-il de grandes différences entre l'original et votre version?
Keanu Reeves: Comme je l'ai déjà dit, le point de départ de l'original ne fonctionnerait plus maintenant. Dans notre version, l'humanité a droit à une chance, mais elle doit assumer les conséquences de son ignoble attitude. Ma collègue dans le film, Jennifer Connelly dit à un moment quelque chose de très intéressant: "Ceci est notre moment." C'est une petite phrase qui peut être interprétée de diverses manières.
Quelque chose de tout à fait différent: faites-vous encore de la musique?
Keanu Reeves: Chez moi, oui. Mais mon groupe, Dogstar, a splité il y a déjà quelque temps. Pourquoi? On joue ensemble pendant neuf ans dans des endroits renfermés, et on finit par se détester. Ce n'est pas vraiment très porteur pour votre développement musical. (Rit) Non, j'exagère. On ne se déteste pas. C'est simplement devenu un peu trop compliqué.
On a déjà pu vous voir dans plusieurs films présentant un message spirituel. Pouvez-vous nous dire quelque chose sur vos croyances propres ou votre philosophie?
Keanu Reeves: Evidemment, j'ai un côté spirituel, même s'il ne ressemble même pas de loin à ce que je défends dans mes films. Quoi que... finalement, toutes les croyances reviennent sur les mêmes métaphores et histoires. N'allez pas vous imaginer que je crois aux loups-garous ou aux vampires. Mais je suis persuadé qu'il y a plus que ce que l'oeil nu peut percevoir. J'ai déjà eu l'occasion de m'en rendre compte.
Merci pour cette discussion!
Steven Tuffin