Le cinéma africain n’ayant que trop rarement les honneurs des salles obscures belges, il s’agit de ne point rater l’occasion d’en découvrir les pépites. Timbuktu est sans aucun doute de cette trempe, tant pour sa maîtrise formelle que pour le discernement de son propos et de son point de vue.
Abderrahmane Sissako aborde la question de l’extrémisme religieux en montrant les conséquences des lois liberticides du régime djihadiste sur la vie quotidienne de la population de Tombouctou, au Mali. Il dépeint l’enfer absurde instauré par les djihadistes: une poissonnière contrainte de porter des gants pour ne pas exciter les hommes, une jeune fille mariée de force ou ces jeunes jouant au football sans ballon, le sport étant, tout comme la musique, interdit de pratique. Si la charge contre le régime djihadiste est virulente - et parfois non dénuée d'humour-, le réalisateur mauritanien ne présente pas djihadistes comme des monstres sanguinaires mais comme des êtres humains empêtrés dans leurs contradiction et affrontant leurs démons.
A mille lieues de l’approche militariste à laquelle Hollywood nous a habitué, Timbuktu propose une vision inédite, intelligente et profondément humaniste de ce sujet d’une brulante actualité. Présenté à Cannes en mai dernier, Timbuktu aurait largement mérité une Palme d’or.